Il est difficile d’aborder le concept de l’ancrage par écrit tant les mots sont limités pour décrire un état d’être, une sensation. Il s’agit d’une pratique de chaque instant.
Qu’est-ce que l’ancrage ?
L’ancrage est un concept omniprésent dans différentes pratiques comme la religion au sens étymologique du terme (religare que l’on peut interpréter comme « relier à Soi »), les art martiaux ou encore la méditation. Il porte plusieurs noms mais il s’agit toujours du même état : celui de retour à soi et de vigilance. Autrement dit, être présent à soi-même.
Il s’agit d’une posture à la fois extérieure et intérieure. Dans notre vocabulaire actuel, on peut décrire quelqu’un comme étant « posé » ou encore « qu’il/elle a les pieds sur terre » à l’inverse d’être « tête en l’air » ou d’avoir l’air « absent ».
Etre présent à soi-même ne peut se faire qu’au présent, c’est-à-dire en se concentrant sur ce qui est maintenant plutôt qu’en s’éparpillant sur ce qui pourrait être ou sur ce qu’il aurait fallu.
Il s’agit d’un des aspects les plus important, à mon sens, concernant l’évolution de la personne car il permet d’éviter tout blocage au niveau émotionnel. Cela ne signifie pas que nous ne ressentirons pas une émotion « indésirable » comme de la colère ou un chagrin. Cela signifie que l’émotion « passera » plus facilement, que nous ne nous accrocherions moins, voire pas du tout.
La pratique de l’ancrage
L’ancrage passe par une posture physique qu’il est possible d’adopter n’importe où. Parfois nous sommes surpris par une émotion, il est alors utile d’avoir cette voie de retour à Soi, de pouvoir se recentrer. Quand je parle d’être « centré », je parle du centre de gravité.
La plupart du temps, on peut sentir que notre centre de gravité est plus haut que le niveau du nombril, comme si nous étions porté au niveau de la poitrine ou de la tête. Le « but » (si l’on peut parler de but pour une pratique qui n’a pas de fin) est de redescendre dans le bassin.
Si jamais le temps est à la tempête, réfugiez vous dans la calle et non dans le nid-de-pie. Il y aura moins de secousses :
De même si une émotion est trop forte, revenir à la respiration et se poser dans le bassin permet de ne pas se laisser embarquer. Cela permet une détente et une certaine fluidité, dans le sens où il est possible de laisser passer l’onde ou l’énergie.
« Pour approfondir la notion de détente, il faut tout d’abord distinguer nettement , d’une part, la tension au sens de crispation, de contraction, et le laisser-aller, l’état de dissolution et, d’autre part, la tension « juste » et la détente « juste ». Dans le premier cas, il s’agit d’états opposés, alors que, dans le second, il s’agit de deux aspects complémentaires de toute unité vivante. Aussi, le but recherché dans la décontraction « juste », éliminatrice de tensions, n’est jamais de parvenir à un état de dissolution, mais au contraire à un état de tension « juste ». »
– HARA, Centre vital de l’homme par K.G. DÜRCKHEIM
L’extrait ci-dessus nous rappelle l’attention et la présence requise lors de cette pratique qui s’oppose à un laisser-aller, à une vacance du corps.
La posture
L’essentiel de la posture vient de l’alignement de 3 points du corps : le bassin, le coeur et la tête. Il est possible de travailler la posture debout ou assis.
S’ancrer debout
Debout, les bords extérieurs des pieds parallèles, laissez tomber le bassin comme si vous vous asséiez sur un support. Les genoux sont déverrouillés, légèrement fléchis et le bassin pivote vers l’avant.
La position des mains est libre mais je vous invite à les garder le long du corps ou au niveau du nombril. Une fois le bassin posé, il s’agit de se tenir droit, sans tension.
Pour cela, le menton est rentré comme si un fil invisible, attaché au sommet du crâne, vous tirait vers le haut.
Normalement, le bassin, le coeur et la tête sont alignés. Prenez votre temps pour respirer, le plus lentement possible et laissez-vous tomber dans la posture.
C’est le but recherché de la posture de l’arbre en Qi Gong ou de la posture de la montagne (Tadasana) en yoga qui mettent en évidence cette tension « juste ».
S’ancrer assis(e)
L’ancrage assis, avec une chaise ou non se pratique de la même manière. Il est toutefois impératif que les genoux soient en dessous du niveau du bassin. Pour cela, il ne faut pas hésiter à utiliser des coussins pour se réhausser.
La place de la respiration
La respiration, élément de base de la vie, est primordiale à toute pratique. Celle de l’ancrage ne fait pas exception, aussi, je vous invite à placer votre respiration au maximum au niveau du ventre. Il peut être utile de placer les mains au niveau du nombril pour sentir le ventre se gonfler et se vider.
Il s’agit de votre seul objet de concentration une fois posé dans la posture. Prenez le temps d’allonger l’inspire et l’expire.
Quelques exercices
Il existe également une manipulation de kinésiologie qui permet d’équilibrer l’énergie et de sentir une réelle différence sur notre centrage/ancrage :
Dans un premier temps, je vous invite à vous tenir debout, pieds nus, et à sentir vos appuis au sol. Est-ce que je penche à gauche, à droite ? En avant ou en arrière ? Suis-je en appui sur l’extérieur de pieds ou l’intérieur ?
Que se passe-t-il si je ferme les yeux quelques secondes ?
En maintenant une main immobile sur le nombril
– Etape 1 : Faites glisser la peau simultanément, en appuyant, au niveau des lèvres inférieure et supérieure. Idem en inversant les mains.
– Etape 2 : Faites glisser la peau, en appuyant, sous la clavicule, à mi-distance entre l’épaule et le sternum (si besoin, rentrez les épaule pour sentir comme un trou de chaque côté). Idem en inversant les mains.
– Etape 3 : Frottez énergiquement la zone sacrum-coccyx (vous devriez sentir l’os sous le pouce). Idem en inversant les mains.
Cet exercice met en relation différents méridiens et permet d’aligner le corps selon ses 3 axes : haut/bas, gauche/droite et avant/arrière.
Maintenant, vérifiez à nouveau vos appuis. Y a-t-il un changement ? Quant est-il de votre équilibre intérieur ? Comment vous sentez-vous ?
Dans la médecine chinoise, l’Homme est considéré comme un canal entre la Terre et le Ciel. A ce titre, il est essentiel d’être connecté à ces deux éléments. La pratique de l’ancrage consolide les fondations de l’Homme en l’enracinant pour qu’il puisse s’élever, se tenir droit. Plus cette pratique sera présente dans le quotidien, plus les tensions inutiles laisseront la place à une autre forme d’intelligence, celle de notre corps, que certains appellent Intuition.